Si vous me suivez depuis quelques temps, vous savez l’endométriose est un sujet qui me tient fortement à coeur.
Atteinte d’une endométriose sévère (stade IV), je partage depuis plusieurs années des articles de sensibilisation, mais aussi des astuces naturelles pour mieux vivre la maladie au quotidien.
J’ai été diagnostiquée en 2011, quand l’endométriose était une maladie quasi inconnue. La plupart des gynécologues ne comprenaient pas la maladie, et aucune communication nationale n’était faite, ce qui rendait le diagnostic extrêmement long et complexe.
Mais aujourd’hui, l’endométriose est largement relayée dans les médias, merci aux femmes malades qui libèrent la parole, aux associations, aux personnalités publiques qui tiennent des tribunes, mais cela a-t-il fait évoluer le quotidien des malades ?
A l’occasion de la semaine européenne de prévention sur l’endométriose, j’aimerais revenir sur les évolutions de la prise en charge des malades, en 2018.
L’endométriose s’invite dans la sphère médiatique et publique
L’effort fait par les associations comme Endomind et Endofrance pour réveiller l’opinion publique sur le scandale de l’endométriose en s’associant à des personnalités publiques comme Julie Gayet ou Laetitia Millot a été efficace. L’endométriose est désormais présente dans les débats publics au ministère de la santé, dans les émissions de télévisions, les magazines, en radio…
Les femmes savent désormais qu’avoir mal pendant leurs règles, au point de devoir s’arrêter de vivre normalement ou ne pas pouvoir se soulager est anormal, et qu’il existe des associations pour trouver de l’information et des contacts de spécialistes. C’est extrêmement positif.
Il y a quelques années, il était difficile de trouver de l’information fiable, on jouait plutôt au petit bonheur la chance avec un diagnostic fait sur Doctissimo. La maladie porte désormais un nom, et le matraquage médiatique semble prendre de plus en plus d’ampleur, preuve que les choses avances.
2 mots clefs : hystérectomie et bébé miracle
Pourtant, ce que l’on retient de cette maladie dans les médias reste les femmes qui réussissent à tomber enceinte (Laetitia Millot) et celles qui subissent une hystérectomie en dernier recours (Lena Dunham).
L’entre deux ne semble pas exister entre happy end et solution ultime, la maladie s’arrêterait après avoir eu un enfant ou en se faisant enlever l’utérus.
C’est encore un problème de gros titre vendeurs et articles écrits à la hâte sur un sujet complexe. L’endométriose ne se soigne toujours pas, même après une grossesse, et encore moins en enlevant les organes reproductifs de la femme. L’hystérectomie est efficace (parfois temporairement) uniquement en cas d’adénomyose, en bref si votre endométriose est placée sur la vessie ou le rectum, cette opération ne sera en rien efficace.
Alors quand on ne veut pas d’enfants, et que l’hystérectomie ne sert à rien (encore faut il accepter de le faire), on ronge bêtement ses ongles devant les articles accrocheurs qui pullulent sur la toile. Mieux vaut en parler, même mal, mais parler d’endométriose ?
On parle encore trop peu des douleurs autres que pelviennes due à l’endométriose, comme les problèmes urinaires, digestifs, les difficultés à s’assoir, à marcher, la fatigue chronique, le système immunitaire faible, les douleurs dorsales, la prise ou la perte de poids, la dépression, l’absence de vie intime… L’endométriose ce n’est pas juste avoir mal au ventre pendant les règles.
Vie ma vie de malade de l’endométriose
Alors entre deux articles sur une grossesse inespérée, on évoque finalement peu les vrais problèmes, comme le manque de traitements efficaces, car même en 2018 on a toujours le choix entre anti-douleurs qui rendent stone, provoquent des douleurs à l’estomac ou ne sont tout simplement pas efficaces, les contraceptifs et leurs effets secondaires (libido pourrie, bouffées de chaleurs, perte ou prise de poids ou moins de douleurs ?), et surtout jouer au petit chimiste.
Les groupes de soutien de malades sont un excellent exemple, car à force de faire face au manque d’information sur les traitements disponibles, les femmes se regroupent sur des groupes Facebook pour échanger sur les options, les médecins, et la gestion de la maladie au quotidien.
Au Royaume-Uni, où obtenir un rendez vous avec un service spécialisé demande souvent une argumentation solide à son médecin généraliste, et une attente allant parfois jusqu’à 18 mois, l’aide de femmes aguerries à l’exercice se révèle précieuse.
Alors oui, les associations font un travail exemplaire, les essais cliniques se multiplient, mais l’espoir se forme surtout pour les générations à venir.
En attendant, on continue à vivre au jour le jour, en guettant la moindre douleur, entre anti-douleurs, bouillotte, TENS, compléments alimentaires, yoga, méditation, pas trop de sucre, de gras, de gluten, de lactose, de soja, d’alcool, de sel, mais des épices, de l’exercice, mais pas d’exercices violents… Vous comprenez le casse-tête ?
Un espoir pour les générations futures et un élan de sororité
Quand je vois mes amies parler ouvertement de leurs menstrues ou des livres comme Le grand mystère des règles de Jack Parker, j’ai bon espoir dans l’avenir.
Que vous soyez atteinte d’endométriose ou non, il faut libérer la parole autour des menstruations et en faire un sujet “commun”. Non les anglais n’arrivent pas, personne n’a ses ragnagnas, et il n’est pas honteux de demander une serviette en public.
Il ne faut pas avoir honte de dire que l’on a ses règles, ou mal au ventre, et que dans certains cas cette douleur est trop intense pour faire certaines choses basiques du quotidien.
Je pense aux jeunes femmes qui grandiront avec l’idée qu’avoir ses règles peut être un non-évenement chaque mois ou une maladie, mais dans les deux cas en rien un sujet tabou.
Pour finir sur une note en demi teinte, rappelons que l’endométriose ne se guérit toujours pas en 2018, et qu’aucune solution ne semble se dessiner dans un court ou moyen terme.
Alors, parlez de vos règles, soutenez les femmes atteintes d’endométriose, ne banalisez pas la douleur, et contactez des associations et parlez à votre médecin si vous pensez en être atteinte.
Photo de Georgie Wileman
12 Comments
Merci pour cet article Anouchka, très juste en tous points. Depuis mon diagnostique il y 6-7 ans, j’ai passé un nombre incalculable d’heures le nez dans les livres et sur le net à la recherche de “concret”, mais tout ce qu’ai pu trouvé jusqu’alors était systématiquement les mêmes “endométriose et bébé”, “endométriose: ménopause artificielle ou pilule?” etc… Les à-côtés vécus au quotidien ne sont que rarement évoqués, preuve que cette condition est toujours source de gêne de la part des femmes, de leur entourage, gêne bien évidemment renforcée par le black-out total côté médical.
A force de recherches, de questionnements, d’expériences vécues, lues ou entendues, je suis devenue une fervente “militante” de l’info sur la maladie et n’hésite jamais à aborder le sujet des règles quelque soit la personne que j’ai en face de moi. La question du corps féminin et de son fonctionnement est encore largement évitée/ ignorée par beaucoup et je me suis aperçue qu’en fournissant des explications claires, les gens en demandent plus. Et les langues se délient peu à peu. C’est en faisant sauter ces tabous ridicules que les choses bougeront d’autant plus. Alors encore merci à toi d’y contribuer <3
Merci Coraline!
On élude complètement le quotidien des malades, en dehors de l’infertilité!
Et mille fois d’accord avec toi sur le fait que parler d’endo amène une gêne immédiate, qui peut être brisée par le fait d’en parler sans tabou, oui on parle de regles, de douleurs au ventre, parfois d’infertilité, mais ce n’est pas plus sale qu’une grippe!
Il faut continuer d’en parler, encore et encore, briser les tabous, ça servira aux générations à venir !
<3
Article important. On en a déjà parlé, j’ai été diagonistiquée avec de l’endométriose à 17 ans, en 2000 donc, par une gynéco super, qui m’a cru (comme ma mère) quand je disais qu’il y avait des douleurs qui clochaient dans le ventre, quand je m’étirais ou me tournait (je devais ensuite compenser en me pliant en deux) : ce n’était pas juste des douleurs de règles. J’ai été opérée, et suivie depuis, sans “rechute” si je puis dire : je me sens chanceuse quand je vois la lutte que c’est pour certaines. C’est peut-être le diagnostic qui est arrivé tôt qui m’a aidée.
Est-ce que l’acupuncture fait partie des remèdes alternatifs envisageables ?
Merci Mathilde! Le fait d’être diagnostiquée et opérée tôt baisse évidemment le taux de rechute. Mon médecin m’expliquait qu’il y a avait aussi la localisation et la gravité de la maladie.
Exemple, mon endo revient en moins de 6 mois après chaque opération, la maladie est un peu hors de contrôle, sauf avec un traitement type Mirena.
Le soucis aussi est que quand l’endo n’est pas que pelvienne (digestive, respiratoire, recto-vaginale) le diagnostic est vraiment complexe… Même si aujourd’hui on commence enfin à faire le lien entre tous ces symptomes, on continue de voir des femmes faire le tour des spécialistes avant d’être diagnostiquée.
L’acupuncture est très efficace sur les douleurs pelviennes, ça evite la prise d’anti-douleurs, ou pour le dos, la forme générale. Les massages traditionnelles chinois aident aussi à bien faire circuler le sang (essentiel). Ca reste un allié excellent pour éviter de se gaver de comprimés, et éviter la fatigue chronique. Mais l’alimentation et les compléments alimentaires sont une grosse partie du job!
A.
Merci d’aborder ce sujet oh combien important, ça me rend dingue que l’on ne soit pas capable de trouver des solutions. Sujette à des règles très douloureuses depuis toujours (mais elles ne durent que 3 jours c’est le côté positif), je me suis rendue compte que j’ai tellement l’habitude d’avoir mal que je ne prends plus rien. Souvenir d’un médecin qui m’a dit à 15 ans que il n’y avait rien à faire et que seule une grossesse pourrait améliorer les choses, merci à lui, on avait noté que j’avais des kystes à chaque cycle à l’echographie mais 0 solution.
C’est une bonne chose que la parole se libère et que les femmes en parlent, mais en dehors de cette parole je n’ai pas l’impression que les choses avancent côté médical
J’ai vraiment cette impression, on en parle beaucoup, mais la recherche ne suit pas (ou ne communique pas ?). J’ai l’espoir d’apprendre une évolution dans le traitement dans les années à venir…
Tu devrais quand même voir un/e spécialiste plus compétente, au moins pour t’éviter de souffrir 3 jours ?
Pour le reste… c’est une maladie “de femmes”, pour les hommes ont a invité le viagra!
J’avoue avoir un peu lâché l’affaire parce que j’ai tant d’autres problèmes de santé encore plus pénibles, ce qui n’est pas bien c’est vrai.
J’avoue que ce sujet me travaille depuis quelques temps, mais j’ai parlé à mon médecin de certaines douleurs et il m’a dit que c’etait normal…. rien de plus. En tout cas, je vous soutient toutes, courage
http://santé-alimentation.fr
Tu devrais peut être voir un/e spécialiste histoire de faire un bilan ? C’est toujours important si on doute.
Anouchka
Bonjour Anouchka,
Merci de lever le voile sur cette maladie via ton blog. J’ai été diagnostiquée en janvier, donc je découvre à peine les “dessous” de l’endométriose et je trouve cela très dur à “digérer”… surtout à cause de la difficulté à trouver des professionnel·le·s bien informé·e·s sur la question. J’avais déjà lu tes articles sur le sujet alors que j’ignorais être atteinte de cette maladie – je vais prendre le temps de les relire, avec un nouveau regard à présent…
Bonjour
Diagnostiquée en 2010, kyste important sur un ovaire, opération, ménopause artificielle pendant 6 mois et depuis..pilule en continue.
Seule solution qui m’a été apportée et qui est a priori celle qui évite de souffrir (car j’ai beaucoup trop souffert… impensable de reprendre 1 à 2 antidouleurs par jour!)
Je suis toujours en recherche de trouver une solution alternative car la pilule en continue n’est pas une bonne chose pour l’organisme, mais je refuse de souffrir… et quand je dis souffrir c’est pas une petite douleur mais l’impression qu’on m’enfonce un couteau dans le ventre…
“faire un enfant”… je l’ai tellement entendu celle là mais ça n’est pas une fin en soi. (tout le monde ne veut/peut as avoir d’enfant)… sans compter que l’endométriose pose de sérieux problèmes de fertilité!
Bref, stigmatisées “douleurs de chochotte”, ou “c’est pour pas faire de sport”,”non mais c’est bon c’est juste des douleurs de règle”…NON! ça n’est pas ça.
Il faut absolument que les gens en prennent conscience…hommes comme femmes d’ailleurs….
Si quelqu’un a une solution, je pense que nous sommes toutes en attente…
🙂
L’endométriose, ça touche plus de femmes qu’on ne le croit. Les règles douloureuses ne sont en aucun cas normales ! Ma sœur l’a et elle souffre beaucoup. Elle l’a eu suite à la césarienne qu’elle a dû faire pour donner naissance à son fils. Elle a subi une perte de poids incroyable, c’est ce qui lui a mis la puce à l’oreille. Je dois dire que c’est un sujet qui me touche beaucoup également. Courage à toi !