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La social mum, ou pourquoi je déteste les groupes de parents

2 February 2017

 

Avoir un enfant est un gigantesque terrain d’étude sociologique. Depuis la naissance de mon fils, je me fait la reflexion au moins une fois par jour “si j’étais encore étudiante, j’écrirais mon mémoire sur la social mum “. Je vous explique.

L’autre jour, je suis allée à ma première séance parents-enfants, ok soyons honnêtes : maman-bébés. Naïve, je voyais la chose comme un moment cool pour aller voir La La land avec mignon en buvant un ginger Ale. Naïve, le mot est petit, j’ai découvert en fait un monde parallèle : une communauté de mamans.

En arrivant à Londres, j’ai habité 2 ans dans un quartier très vivant, populaire, central, mais pas très adapté aux familles : pas de parcs, ni de sacro saintes aires de jeux. Et j’ai déménagé par hasard dans un quartier un peu plus loin, vraiment mignon avec des boutiques, des restaurants, un immense parc et des trottoirs larges (oui un jour, tu dois penser à la taille du trottoir).

Enceinte jusqu’aux yeux, une femme m’avait alors abordé dans une boutique pour me féliciter (sympa), et me dire que j’avais bien choisi le quartier qui avait une “super communauté pour les jeunes parents”, et d’ailleurs ils avaient un groupe Facebook pour discuter. Moi, je pensais surtout à ma communauté personnelle “matcha latte et brownie du café du coin”, mais ma mère m’a tout de suite dit “Ca peut être pratique”. Mes parents étaient plutôt du genre à venir à la sortie scolaire en tirant à pile ou face au bout du 10e rappel, et encore on déménageait avant (je suis sure qu’ils faisaient exprès), alors les communautés de parents…

Bref, mon monsieur et moi avons rejoint le fameux groupe Facebook de parents du quartier (sait on jamais), et comme je suis polie je me suis présentée. Ca se faisait vachement dans les forums gothiques que je fréquentais en 2001. Et là, j’ai reçu dans les 5 minutes le message d’une future maman, qui allait accoucher en même temps que moi, et me proposait de se rencontrer.

Panique à bord, pourquoi ? Mais comme je suis avide de nouvelles expériences, et que personne ne m’en pensait pas capable, j’ai décidé de dire oui. Je me suis donc retrouvée coincée dans un groupe WhatsApp avec 3 autres futures mamans qu’elle avait convié (casté) pour un café.

J’ai failli annuler 3 fois avant de me motiver. Je suis plutôt solitaire, mais super sociable. Je n’ai aucun soucis pour prendre la parole en public, c’est même mon métier, ou rencontrer des inconnus, mais je déteste le phénomène du groupe, surement un mauvais souvenir des années collège (ou années de misère sociale, au choix).

Me voilà donc dans un Starbucks avec 3 femmes aussi enceintes que moi, le tout animé par cette fameuse social-mama. Accrochée à mon matcha latte, je fais connaissance d’une autre maman aussi gauche que moi, pas anglo-saxonne (ça aide), qui avait l’air de détonner dans le paysage codifié de ce genre de rencontre. Un moment finalement pas si mal.

Tout ce petit monde continue donc d’échanger un peu sur WhatsApp (à ce titre, on peut se préparer à beaucoup de choses, mais la conversation à plusieurs sur W’app est dans mon top 3 de l’angoisse), parlons de la livraison de nos paquets respectifs ou échangeons sur le post-partum (hé…).

La super social mum, elle accouche en 3h chrono, se promène dans le parc 2 jours après la livraison, n’a pas vécu de post-partum à part je cite “2 migraines”, et sans respect pour son périnée elle fait même un footing au bout de 4 semaines. Bref, tu vois le genre.

Une fois, j’ai eu le malheur de taguer ma première sortie au parc sur Instagram, et la social mum a tout de suite réagi “J’y vais aussi, il faudrait que tu me préviennes la prochaine fois”. Je préfère marcher en écoutant Pantera ou même un livre audio en fait.

Et surtout, elle nous relance pour se faire un déjeuner, enfin surtout pour voir nos bébés. Bon, je vais éclaircir un point : j’ai des copines avec des enfants, mais on se connaissait “d’avant guerre”, et avons plein de points communs à part nos rejetons. C’est cool des copines mamans, tu peux échanger des tips, des anecdotes, mais on se parle aussi d’autres choses. Moi ces femmes, à un déjeuner, je ne me vois pas leur raconter grand chose de plus, et le social talk (spécialité anglo-saxonne), m’ennuie.

Mais, comme je suis bien éduquée (bisous Papa et Maman), je précise aux nanas que je vais aller au cinéma pour voir La La Land, et qui m’aime me suive. En fait, je ne suis pas si bien éduquée, mais croiser quelqu’un par hasard alors que l’on peut potentiellement se voir au même endroit me met mal à l’aise. Evidemment la social mum aussi allait au cinéma, oui, parce qu’elle va à TOUS les événements de mamans, et elle “voulait voir mon fils” (décidément). Vendu!

Le lundi matin devant le ciné avec Jim (mon enfant à un prénom), je lui envoie un SMS pour lui dire que l’attend à l’intérieur. Polie, j’arrive, m’installe, lui garde une place (retenez bien), et une armée de poussettes et rejetons plus ou moins contents débarque.

Prévoyante, je commence à nouer mon écharpe de portage pour y mettre mon fiston, et là une rangée de mamans me fixe et chuchote, une d’entre elles me voyant amusée-agacée me dit “Ca à l’air comfy”. Menteuse. Techniquement je n’en sais rien, je ne me fait pas balader dans une écharpe au quotidien moi.

Une femme m’accoste “Vous êtes seule? Non? Ca vous dérangerait de vous pousser d’un siège, j’aimerais que mes amies puissent s’assoir à côté de moi”. Et, 3 mamans me regardent de haut en bas avec une pancarte “Elle est seule”, en attendant ma réponse. Je capitule, toujours trop polie.

La social mum arrive, et part discuter avec un groupe de femmes. Je découvre qu’elle connait tout le monde, évidemment. En attendant, j’en profite pour sortir un biberon et nourrir l’ogre, et provoque le regard exaspéré de toutes les femmes allaitantes (80% de l’assemblée, je le découvrirais ensuite).

Polie (ça me perdra), je vais donc saluer la social mum, qui me présente à tout son petit groupe, et me dit “on parlait d’allergies alimentaires” et là, 4 paires d’yeux me regardent en attendant une réaction. Dieu merci, je suis intolérante au gluten, qui m’a permis de faire une entrée correcte.

J’explique à la social mum que je lui ai gardé une place (bien au milieu devant l’écran), elle me dit qu’elle va s’assoir à côté de ses copines, à l’extrémité, ben oui logique. Je ravale un fou rire, j’ai 15 ans, je suis de nouveau la gothique qui a tenté de faire un effort au collège pour être sympa. Meilleur moment pour prétexter un changement de couche et fuir la situation.

Le film démarre, je vois une armée de têtes chauves fascinée par le film et la musique, mon fiston qui se comporte comme un pro, roupille ou gigote sur mon ventre. Un joli moment. Sauf que fiston, précieux du postérieur, réclame une couche propre, je fais donc un aller retour, en profite pour coincer la anse de mon sac dans la poignée de la porte (Pierre Richard), et croise le regard de la social mum et ses copines, encore.

La séance terminée, je vais dire au revoir à la social mum qui me dit “A jeudi matin pour le café ?” Bof.

Le jeudi matin, elle va à un café “femmes enceinte et mamans” au bout de ma rue. Moi, je prend mon café seule avec mignon en écoutant France Info, je lui explique le Penelope Gate ou la dernière de Donald Trump, il me répond des areuhs, c’est notre rituel. Je préfère nos conversations approximatives plutôt que de me cogner les douleurs ligamentaires et les accouchements physiologiques d’une dizaine de mamans.

Plus tard dans la journée, je vois une femme poster un message sur le groupe Facebook des parents du quartier : elle est mère au foyer, et souhaiterait rencontrer d’autres mamans pour ne pas rester seule toute la journée. Et là, devinez qui répond dans la seconde pour lui proposer un verre ? LA SOCIAL MUM, qui je cite “est toujours partante pour faire quelque chose”. Evidemment, une nouvelle prise dans ses filets.

S’en suit plein de réponses d’autres social mums : elles vont le lundi au cinéma, le mardi à la bibliothèque, le mercredi à l’éveil musical, le jeudi au café… Parfois elles vont même boire un verre de vin l’après midi pour s’encanailler (misère). Moi j’ai un peu de dignité et de savoir vivre pour ouvrir une bouteille de rouge qui tâche … à partir de 18H30 seulement. La social mum travaille d’ailleurs sur une liste de toutes les classes pour bébé du quartier (pour vrai).

Je découvre donc un monde parallèle : la communauté de mamans. Ces femmes se réunissent, font des choses ensemble avec leurs mouflets, se regardent, se comparent, font semblant de se trouver des points communs, peut être l’ennui ? Et je me demande comment elles font d’ailleurs pour s’ennuyer.

La jeune recrue a du elle aussi se retrouver dans un groupe WhatsApp de mamans, qui se réunira surement pour un déjeuner, un café ou pour les plus délurées, une part de gâteau.

Dans mon groupe WhatsApp à moi, c’est la guerre du “ma thérapeute du périnée est mieux que la tienne”. J’abandonne, tout ça n’est vraiment pas définitivement pas fait pour moi.

Je prétexterais surement un mensonge de dernière minute pour ne jamais aller déjeuner avec ces mamans et pour éviter de parler couches et éveil musical. Je me rend compte que j’ai 30 ans, ma vie, mes amies, et pas envie de me forcer à rentrer dans une communauté uniquement parce que j’ai eu un enfant.

Mes meilleures amies n’ont pas d’enfants, et on continue de parler de tout, comme avant. Avoir un enfant n’est pas un point commun pour démarrer une amitié, et je ne veux pas me forcer à rentrer dans le moule pour faire comme tout le monde. Je n’ai jamais fait et ne sait pas faire, et c’est peut être ça qui m’a suffisamment donné suffisamment confiance en moi pour fuir ce phénomène du groupe et ses codes, qui m’ont toujours beaucoup stressée. A 15 ans ça m’angoissait, à 30 ans j’en rigole bruyamment.

Alors je serais surement celle qui ne connait personne au cinéma du lundi, celle qui va reprendre le boulot dans quelques semaines à peine, ou celle qui n’a pas envie que ses conversations avec les copines tournent uniquement autour du bébé, mais je ne deviendrait pas la social mum.

 

La social mum, c’est finalement une des Mean Girls du collège qui a eu un bébé et continue de régner sur sa petite communauté. 

 

 

 

 

Des anecdotes ou réactions sur les social mums ? Racontez moi tout! 

 

 

Crédit image illustration : Buzzfeed + film Mean Girls

 

 

 

 

 

Lifestyle, Maternité

Et puis j’ai changé de vie pour devenir maman

2 January 2017

Le 20 novembre 2016, j’ai changé de vie.

Il y a 6 semaines, j’ai sauté dans le vide sans filet de sécurité en devenant mère. Je pourrais vous faire le grand classique du “je l’ai aimé dès que mon regard à croisé le sien”, mais je suis bien trop cérébrale pour ça. Il faut toujours que je prenne de la distance sur mes émotions, la première chose à laquelle j’ai pensé a été “J’ai la responsabilité de ce petit être maintenant”. Et tout s’est accéléré : la peur, l’excitation, et surtout l’amour. Cette sensation d’avoir vécu la chose la plus extraordinaire de ma vie, et l’envie de photographier tous les gestes, les odeurs, les voix. J’aurais voulu capturer la première bouffée d’air qu’il a respiré.

Et il y a eu la suite, l’apprentissage des gestes pour prendre soin de cette petite personne. Celle qui ne connaissait rien aux nouveaux-nés voit désormais ses journées rythmées par les biberons, les couches ou la recherche de la meilleure tisane pour bébé.

On passe au-dessus de tout en devenant mère, la douleur si forte de l’après accouchement, la fatigue aussi. On apprend chaque jour à communiquer tous les deux, il m’apprend à devenir patiente face aux miaulements et à ses grands yeux éveillés alors que le soleil dort encore.

Il y a les cernes, le teint brouillé et le café froid du matin qui remplace les jolis petits déjeuners colorés, mais tout s’oublie instantément quand on aperçoit un sourire.

Moi qui suis si solitaire et indépendante, j’apprend à tout faire à deux, à m’adapter à son rythme. A ne pas pouvoir traverser Londres pour un thé chez Yumchaa, ou d’aller au yoga et déjeuner avec mon livre. Je crée une nouvelle routine avec mon mini, souvent endormi dans sa poussette : les promenades, les cafés, les courses ensemble, et le fait de l’avoir fait voyager avec moi pendant 9 mois semble l’avoir déjà habitué à mes escapades.

La carrieriste que je suis apprend pour la première fois à ne pas penser au travail pendant quelques mois pour se consacrer à la vie de famille, et bon sang que c’est bon! J’ai l’impression d’être devenue une Shiva moderne : être mère c’est toujours avoir plusieurs choses à faire, et souvent en même temps.

Je n’aurais jamais penser ressentir une émotion si forte en le voyant rassuré instantanément, la tête collée sur moi pour écouter les battements de mon coeur. Ca existe donc vraiment une telle connexion entre 2 êtres?

Le vieux couple construit maintenant une vie à 3 (5 avec nos deux matous), diner à tour de rôle, ou regarder un film en 3 parties, mais les fous-rires, la tendresse et tout l’amour que ce petit-être a apporté dans notre foyer est indescriptible.

Depuis sa naissance, j’ai gagné un profond respect  pour toutes les mères du monde, celles qui travaillent ou qui se consacrent à leurs enfants. En donnant la vie, on s’engage à élever des êtres humains bienveillants et sensibles. J’aimerais lui apprendre à être un homme respectueux des autres, qui n’a pas peur de livrer ses émotions.

J’ai hâte de lui apprendre à lire, le voir découvrir la musique avec son père, à écrire, à voyager ensemble, mais j’aimerais bloquer le temps pour qu’il reste minuscule et innocent. Il me donne envie d’apprendre des tonnes de choses pour lui transmettre ensuite.

Parfois je me demande si toutes les mères se posent autant de questions, où si mon habilité à retourner les émotions dans tous les sens me joue encore des tours.

Depuis le 20 novembre, j’ai l’impression de vivre sur une autre planète, j’ai fondé une famille, et c’est une monde magique.